Addi Bâ Mamadou
Photo appartenant à Ibrahima Bah. Elle a sans doute été
prise à son arrivée à Langeais, vers 1937-38.

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ADDI BÂ, LE RÉCIT D'UNE VIE

I. L'arrivée d'un jeune
Guinéen en France
>

II. Les tirailleurs errants
du canton de Lamarche >

III. La vie secrète
d'un paisible commis agricole
de Tolliancourt...>

IV. Addi Bâ au maquis >

V. Les difficiles sentiers
de la gloire... >

 



I. L'arrivée d'un jeune Guinéen en France

Comment Addi Bâ quitte le village de Bomboli, dans les années 1930, pour venir vivre en France.

D'après son carnet militaire, Mamadou Hady Bah est né le 25 décembre 1911 à Pelli Foulayabé, commune de Bomboli, dans la région de Pita (Guinée). Il est le fils de Tierno Ibrahima et Hawa Bah, a trois frères, Mamadou Aliou, Alhassane, Mamadou Paté, et une sœur, Fatoumata. Son état civil demeure très incertain. Il est probable que sa véritable date de naissance n'ait jamais été enregistrée par l'administration coloniale (1). Lorsqu'elle recensait les conscrits, l'armée française avait pour habitude d'inscrire d'office le jour de Noël ou le jour de l'an dans les dossiers des jeunes tirailleurs ne pouvant présenter un état civil précis. Les témoignages que j'ai pu recueillir indiquent qu'il avait autour de 27 ans lorsqu'il séjourna à Tollaincourt.

De sa vie en Guinée, on ne sait rien. Sans doute était-il issu d'une famille d'éleveurs. Sa maîtrise avérée de la calligraphie arabe et son attachement à l'Islam laissent à penser qu'il a fréquenté l'école coranique. Il n'est pas impossible non plus qu'il ait suivi l'école des Pères Blancs : tous les témoins s'accordent pour dire qu'il parlait un français parfait, ce qui était loin d'être le cas de la majorité des tirailleurs. Vers le milieu des années 1930, Hady est vraisemblablement employé comme aide de cuisine par un colon français qu'il suit jusqu'en France. On le retrouve vers 1936-37 à Langeais (Indre-et-Loire), installé dans la famille du percepteur de la ville, Ernest Maurice (lequel n'a jamais mis les pieds en Afrique, contrairement à ce qui a longtemps été avancé). Une habitante de la ville, Mlle Violette Camus, se souvient avoir connu avant-guerre « un jeune Africain du nom d'Addi Bâ, hébergé chez M. Maurice, un de mes voisins, alors percepteur à Langeais. Ce jeune Africain faisait également des petits travaux chez le Docteur Pellet, ancien maire de Langeais. » (2)
Un autre témoin (3) rapporte que peu de temps avant son arrestation par les Allemands, Addi Bâ aurait demandé à ce qu'on envoie ses papiers personnels à la famille Maurice au cas où il lui arriverait quelque chose.

Vers 1938, Addi Bâ monte à Paris. Toujours selon ses papiers militaires, il s'installe dans le Ve arrondissement, rue Geoffroy-Saint-Hilaire, près du Jardin des Plantes et surtout de la Grande Mosquée, qu'il fréquente assidûment. Il exercerait alors la profession de cuisinier. Le 13 novembre 1939, deux mois après la déclaration de guerre, il est déclaré apte au service et s'engage le lendemain pour la durée de la guerre, auprès de l'intendance de Paris. Il est immédiatement affecté sous le matricule 1033 au dépôt 188 d'infanterie coloniale de Rochefort, où il effectue ses classes.
Au printemps 1940, les régiments de tirailleurs, restés en réserve dans le sud de la France durant l'hiver, sont envoyés au front. Addi Bâ, qui a rejoint le 12e Régiment de Tirailleurs Sénégalais, se bat dans les Ardennes et en particulier à Beaumont, le 19 mai, où la moitié du régiment est décimée.

Le 18 juin, son bataillon se retrouve acculé à Harréville-les-Chanteurs, à la limite de la Haute-Marne et des Vosges. Placés sous les ordres du chef de bataillon Graff, les tirailleurs ont pour mission d'empêcher les chars allemands de franchir la Meuse. « Le combat s'engage et se poursuit tout l'après-midi et une partie de la soirée. Les Allemands tentent de franchir la Meuse à gué de part et d'autre du pont. Ces opérations s'effectuent avec appui de minen (sic) et tirs de 105. Toutes les tentatives sont repoussées. Le soir, les attaques sont plus mordantes et l'ennemi est arrêté à la grenade et même au coupe-coupe par les tirailleurs de la 6e compagnie sous les ordres du lieutenant de Peralo. Les tentatives de franchissement ennemies sont complètement stoppées. À 23 heures, au moment où l'ennemi semble s'être retiré, arrive l'ordre de repli vers Pompierre. » (4) C'est dans ces circonstances qu'Addi Bâ est fait prisonnier par les Allemands. Il est convoyé avec ses camarades vers le bourg tout proche de Neufchâteau. Selon la version la plus répandue, il s'évade la nuit même. (Lire la suite>)

(1) Selon certaines sources, il serait né en 1905, mais il est plus vraisemblablement né en 1916.
(2) Lettre au colonel Rives, 20 octobre 1990
(3) Paul Joyeux, lettre au colonel Rives, 1er août 1988
(4) Récit dactylographié transmis par le colonel Rives - Auteur inconnu

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